Les mesures annoncées par l'UE en début d'année pour l'obtention de (nouveaux) métaux et minerais sont très insuffisantes. L'UE a élaboré des mesures pour 24 métaux rares, mais 75 % d'entre elles s'avèrent insuffisantes ou irréalisables. Le risque est réel qu'après l'OPEP, l'Europe doive bientôt faire face à une nouvelle cartellisation, cette fois dans le domaine de la métallurgie (OPEM). La dépendance vis-à-vis de la Chine en particulier est dangereusement importante.  

Les métaux tels que le lithium, le cobalt et le nickel sont cruciaux pour la transition énergétique mondiale. Surtout pour la croissance explosive des véhicules électriques (VE), le stockage sur batterie et d'autres applications d'énergie verte. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), le marché des métaux et minerais « rares » a doublé au cours des cinq dernières années, pour atteindre 320 milliards de dollars. Il devrait encore doubler d'ici à 2040.

Dans le domaine des matières premières rares, la Chine joue un rôle prépondérant. Selon nos experts, 91 % des réserves mondiales de magnésium et 76 % des réserves de silicium sont détenues par la Chine. L'UE est également très dépendante de la Chine pour le manganèse. En outre, 60 % du marché mondial du cobalt, par exemple, est détenu par la République démocratique du Congo. L'Afrique du Sud détient 71 % des réserves de platine et la Russie 40 % du palladium.

Selon Johan Geeroms, notre Directeur Risk Underwriting Benelux, les risques géopolitiques sont élevés. « Si de tels pays unissent leurs forces comme l'ont fait les pays producteurs de pétrole, cela rend l'UE extrêmement vulnérable à la manipulation et aux guerres commerciales. Vous obtenez alors une sorte d'OPEM en plus de l'OPEP. Ce sont eux qui déterminent les prix et l'offre. Les mesures annoncées par l'UE au printemps dernier pour prévenir cette dépendance sont tout à fait insuffisantes. »

Johan Geeroms évoque la législation sur les MPC (Matières Premières Critiques). Elle stipule notamment que l'Europe doit s'approvisionner à hauteur de 10 % dans ses propres mines pour 18 matières premières sélectionnées. Pour 7 matières premières, le rapport de recherche indique que cela ne réussira certainement pas (antimoine, borate, manganèse, graphite naturel, terres rares, tantale et titane). Vingt-quatre autres matières premières ont été citées pour lesquelles l'UE exige qu'au moins 40 % de la consommation annuelle provienne de son propre raffinage. Selon Allianz Trade, cela ne peut pas fonctionner pour 21 matières premières.

L'Europe tente de réduire sa dépendance. Par exemple, en encourageant la construction de mines sur son propre territoire. Prenons l'exemple du Portugal, qui possède une bonne quantité de lithium. La Suède a également découvert un important gisement de terres rares. L'UE veut stimuler les investissements dans l'extraction de nouveaux métaux. Entre autres, en facilitant le processus d'octroi de permis et en abaissant les barrières administratives.

D’après Johan Geeroms, depuis des années, l'UE a laissé l'extraction des métaux rares à d'autres pays (Australie, Chine) afin d'éviter des dommages environnementaux en Europe. « Aujourd'hui, c'est en toute hâte qu'elle essaie de rattraper son retard. À notre avis, ce sera beaucoup plus difficile que ne le suggère la loi sur les MPC (Matières Premières Critiques). Nos experts prévoient que l'UE n'atteindra pas la plupart des objectifs fixés. Nous préconisons donc particulièrement de nous concentrer sur une politique commerciale intelligente (partenariats stratégiques) et de travailler sur la diversification des chaînes d'approvisionnement mondiales ».

Le recyclage est également un atout important pour l'UE. La loi sur les Matières Premières Critiques précise que 15% de la consommation annuelle doit être rendue disponible par le biais du recyclage. Johan Geeroms : « C'est une bonne idée, mais elle doit être réalisable. Seize matières premières stratégiques ont été identifiées pour le recyclage, mais nous pensons que l'objectif de 15 % n'est atteignable que pour quatre métaux. Par exemple, parce que les quantités de déchets disponibles sont insuffisantes pour répondre à la demande en forte croissance, comme dans le cas du lithium ».

Enfin, Johan Geeroms pointe la vulnérabilité des chaînes d'approvisionnement. « Prenons l'exemple de la période du coronavirus ou de la guerre en Ukraine. L'approvisionnement en marchandises a été gravement perturbé. Cette vulnérabilité est d'autant plus grande que la demande de nouveaux métaux est énorme et qu'ils sont principalement entre les mains d'un groupe restreint de pays dont la fiabilité est discutable ».

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